L’Opinion Ivoirienne et l’affaire Jacques Ehouo
I – Le Gouvernement ivoirien est plein de certitudes et sûr de lui comme le Pharaon Ramsès II devant Moise. Mais il aura du mal à défendre son propre comportement dans l’affaire qui oppose le député Jacques Ehouo à la justice ivoirienne. Il y a ici un acharnement politique et judiciaire indigne d’une démocratie. Loin de nous l’idée d’une solidarité avec un détournement de denier public.
Ce qui est en jeu ici c’est le risque de l’arrestation arbitraire, d’emprisonnement pour des motifs fallacieux par une justice à plat ventre, aux ordres du pouvoir et au mépris du droit. Les circonstances et les moments que vivent les ivoiriens nous font douter que l’avenir en commun est encore possible dans ce pays ou l’indignité et la forfaiture se sont durablement installées au cœur de l’Etat.
L’incendie rocambolesque de la salle des archives de la mairie du plateau dont on ne sait même plus où se trouvent les suites de l’enquête. Le refus d’installer le conseil municipal issue des urnes et la mise sous tutelle d’une mairie pour un soupçon de détournement, dans un environnement de menaces, d’intimidations, d’accusations et de pressions qui ont fait plus de mal que de bien à notre pays aux yeux du monde.
On est tenté de se demander si ceux qui dirigent ce pays sont vraiment conscients de l’image minable qui se colle au pays par de tels comportements qui puent le règlement de comptes interethniques ou interpersonnels ? Au cinéma comme dans les séries policières, le film prend toujours une tournure dramatique quand le commissaire de police fait de l’arrestation du suspect une affaire personnelle, là où la lucidité commande de réunir les preuves et de le confondre.
L’histoire des erreurs judiciaires le prouve. La partialité de la justice rend toujours un mauvais service au pays et à notre marche commune vers la démocratie et l’Etat de droit. Quel que soit le pouvoir nous devons toujours éviter d’utiliser les instruments de l’Etat : police, gendarmerie et justice pour régler des comptes personnels.
II – L’installation du conseil municipal du plateau
Il faut installer le conseil municipal du plateau, poursuivre ceux qui ont incendié le service des archives de cette mairie. Permettre aux membres de ce conseil d’élire leur maire et poursuivre les enquêtes, étaler les preuves de la culpabilité de Jacques Ehouo, le juger et le condamner s’il est coupable. Voilà ce que demandent les ivoiriens, rien de plus.
C’est le rôle de l’Etat de protéger ses citoyens contre l’arbitraire et non voir l’Etat partial acculé le dos au mur de sa propre négativité utiliser l’ignominie et la bassesse contre ses propres citoyens. Par la faute même de l’Etat cette affaire vient de prendre une tournure ethnique. Les Ebriés sudistes se disent frustrés par le régime nordiste d’Alassane Dramane Ouattara.
Ils disent avoir tout cédé à l’Etat, leurs terres agricoles, l’humiliation d’être des autochtones méprisés et maintenant la machine injuste de l’Etat contre leurs enfants. Hier c’était Joseph Emanuel Dioulo et Noël Akossi Bendjo, aujourd’hui c’est Jacque Ehouo à qui le tour demain ?
L’image du père de Jacques Ehouo, pleurant de désespoir de nuit aux abords d’un palais de justice cerné par une police casquée et aux ordres du pouvoir a achevé de convaincre la plupart des ivoiriens qu’ils sont plongés désormais dans des temps sordides, obscures et incertains ou un pouvoir froid, distant, cupide et arrogant va s’emparer de leur vie comme dans un film d’horreur.
III – C’est un litige purement commercial
L’affaire Jaques Ehouo devait rester un litige commercial entre la Mairie du plateau et un prestataire de services NEG-COM. Si on s’en tenait à ce niveau de sérénité, la justice aurait tranché sans faire de vagues. Mais on voulait pousser Jacques Ehouo à fuir le pays pour y installer qui ?
Dans l’affaire BNDA-COGEXIM, Emmanuel Dioulo avait reconnu devant le tribunal devoir 9 milliards à la banque avec les AGIO le total s’élevait à 11 milliards de francs, il s’engageait à payer cette créance après la vente des stocks de café et cacao dont disposaient son entreprise. Le juge Koulou avait accédé à cette demande.
Le jugement du tribunal se trouve encore dans les archives du parquet d’Abidjan qu’un incendie n’a pas encore ravagé. C’est le gouvernement ivoirien qui non content de cette décision avait demandé après une virulente campagne médiatique à l’assemblée nationale de lever l’immunité parlementaire du député maire d’Abidjan, Joseph Emmanuel Dioulo, qui n’était pas encore condamné par la justice.
Dans l’affaire AKossi Bandjo, nous nous souvenons tous des insultes, des invectives et autres menaces à son endroit jusqu’à ce qu’il ne fasse le choix douloureux de l’exil comme voie de survie. Son tord est de s’être opposé farouchement au RHDP-RDR. Pourquoi ne pas avoir laisser la justice faire son travail en toute indépendance ?
Evitons de transformer un litige commercial et règlement de compte politique. L’histoire judiciaire de notre pays regorge encore aujourd’hui de dossiers nauséabonds qui n’honorent pas notre système judiciaire. – Des faux complots de 1963 à
-L’affaire Kamano François contre CNPS, en passant par – l’affaire LOGEMAD, – L’affaire BNDA-COGEXIM, le Détournement des fonds de l’union européenne, l’affaire Simone Gbagbo et les détenus de la crise postélectorale. Sont encore dans nos mémoires pour exprimer des moments de honte pour notre système judiciaire.
Nous regrettons aujourd’hui encore de faire le constat amer que la surfacturation des complexes sucriers n’a jamais fait l’objet d’une information judiciaire des différents procureurs de la république. Ne parlons même pas de la filière Café Cacao 65 milliards de francs CFA évaporés ou du casse des agences de la BCEAO, à Bouaké, Korhogo et Man. Que doit penser le citoyen ivoirien d’une telle aberration dans un pays qui veut être un état de droit ?
IV – La Confiscation de l’Etat
Nous avons toujours dit que l’alternance politique pacifique ne se produira jamais en Côte d’Ivoire. Nous sommes prêts à prendre les paris. Un régime prébendier n’a jamais fait le bonheur de ses citoyens. Des élections truquées ne peuvent que porter au pouvoir des dirigeants politiques incompétents et illégitimes. Qui sont obligés de s’arcbouter sur leur groupe ethnique pour confisquer l’appareille d’Etat à des fins personnelles, partisanes, partiales et parcellaires.
Il suffit d’ouvrir les yeux pour voir que dans ce genre de pays ou le chef de l’Etat croit marcher sur les eaux et pourtant, les hôpitaux sont des mouroirs, car les soins les plus élémentaires sont payants.
Les écoles aux classes pléthoriques, avec des élèves assis par terre par un manque cruel de tables-bancs. Le chômage des jeunes ne donne plus d’horizon à notre jeunesse, le tout dans un tribalisme institué et assumé par le président de la république lui-même.
Dans un environnement d’insécurité et de corruption généralisé ou des proches du président osent se frapper la poitrine pour dire qu’ils sont des chefs d’entreprises prospèrent avec les marchés d’Etat obtenus de gré à gré. Sincèrement, un pays peut-il renier une partie de sa propre population sans s’affaiblir lui-même ?
Pendant ce temps c’est le chef de l’Etat et son entourage qui lance la chasse aux sorcières pour entrainer les ivoiriens dans un parti politique unifié dont le but ultime est la conservation du pouvoir politique par son clan. Peut-on sincèrement forger un avenir pour les ivoiriens dans une telle confusion, avec des règlements de comptes et des invectives quotidiennement au cœur de l’Etat ?
V – Postulat de conclusion générale
En 1963 pendant la vague d’arrestations pour complot contre la sûreté de l’Etat, aucune voix ne s’était élevée des instances du PDCI-RDA pour empêcher les 18 condamnations à mort prononcées par le tribunal d’exception présidé par un certain Philippe Yacé (que la pitié de Satan soit sur ce qui reste de lui) au sommet de sa gloire. Pendant l’affaire Kamano François-CNPS. L’accusé fut tout seul à se battre contre la machine de l’Etat.
Dans l’affaire BNDA-COGEXIM, ils étaient nombreux à voir en Emmanuel Dioulo, un adversaire si non un ambitieux et personne ne leva le petit doigt pour venir vers lui. Dans l’affaire LOGEMAD, l’avocat de la défense Me Mondon Konan Julien avait dit haut et fort que c’était un procès politique. Pourquoi la Côte d’Ivoire est toujours ce pays, qui a caporalisé l’appareil judiciaire pour humilier et régler des comptes politiques ?
Jacque Ehouo, ne doit pas être seul cette fois-ci. Ses avocats ont demandé à voir les preuves de l’inculpation du détournement, de faux et usage de faux, de terrorisme et de blanchiment d’argent. Cela n’a pas été démontré et étalé. Le bureau de l’assemblée nationale de Côte d’Ivoire vient de demander la suspension des poursuites. Et comme tout cela ne suffisait pas un mandat d’arrêt est émis contre le député de Fresco, Alain Lobognon qui défend son collègue parlementaire Jacques Ehouo.
Finalement nous comprenons pourquoi le rang des déçus du RHDP-RDR, se gonfle de jour en jour. Gouverner par ordonnance avec la justice de son côté comme le disait quelqu’un pour faire des autres des prisonnier en sursis, c’est plonger progressivement le pays dans l’abime. Il faut savoir s’arrêter avant le précipice. Tel est le climat délétère dans lequel baigne la Côte d’ivoire.
De nos observations se dégage cette chose terrible sur laquelle nous n’arrivons pas à mettre un nom. Que les psychologues, les psychiatres les sociologues et les anthropologues viennent à notre secours pour que nous ne mourrons pas comme des idiots.
Très souvent dans l’histoire humaine un groupe de personnes suivent un dictateur, cruel et méchant. Les suiveurs savent bien que les pendaisons, les emprisonnements et les maltraitances qu’ils infligent à leurs adversaires sont indignes, cruelles, humiliantes et humainement déraisonnables. Certains les désapprouvent et pourtant ils ne disent rien. Plus grave ils grimpent tous dans la surenchère, dans l’invectives et la menace contre cette partie du pays qui ne pense pas comme eux.
Sincèrement qu’est ce qui explique ce phénomène qui du jour au lendemain éteint complètement l’humanité qui se trouve dans l’âme de ceux qui sont au pouvoir ?
Philippe Yacé prononçant la condamnation à Mort de ses amis. Blaise Compaoré faisant assassiner ses amis. Mobutu livrant Patrice Lumumba aux sécessionnistes katangais. Habyarimana installant un régime dans lequel les Tutsis n’ont aucun droit. Sékou Touré, faisant tuer Fodéba Keita et Diallo Telli, dans l’impitoyables camp Boiro de Conakry et enfin Alassane Ouattara et son rattrapage ethnique dans un RHDP-RDR de force pour capturer un pays à bout de souffle et esclave de son régime.
Sincèrement perd-t-on la raison quand on accède au pouvoir ? Pourquoi ceux qui sont autour du dictateur se taisent-ils ? On nous dit que c’est par lâcheté, mais enfin soyons sérieux. Est-ce possible qu’il n’y a personne pour dire à Alassane Ouattara qu’il est dans le mal et la cruauté envers les autres ivoiriens ?
C’est en pensant au pasteur allemand, Martin Niemöller, survivant du camp de la mort de Dachau, que nous adressons à ceux qui mangent à la table du pouvoir ivoirien ce qui suit : – Quand le régime de Dramane Ouattara arrêtait les pro-Gbagbo, je n’ai rien dit parce que je ne suis pas pro-Gbagbo.
– Quand ils occupaient les plantations des ivoiriens, je n’ai rien, parce que je ne suis pas planteur.
– Quand ils ont pillé et occupé les domiciles des bétés, je n’ai rien dit car je ne suis pas bété.
– Quand on déportait le syndicaliste, Mahan Gahié, je n’ai rien dit car je ne suis pas syndicaliste.
– Quand ils tuaient les Guérés, les Wobés et les Yacouba à l’Ouest de la Côte d’Ivoire, je n’ai rien dit car je ne suis pas des leurs.
– Quand ils ont commencé à appliquer le rattrapage ethnique, je n’ai rien dit car cela ne menaçait pas ma vie.
– Quand on arrêtait et embastillait nos frères militaires ivoiriens, je n’ai rien dit car je ne suis pas militaire.
– Quand on gelait les comptes bancaires des membres et sympathisants de l’ancien régime, je n’ai rien dit parce que je n’avais pas d’argent en banque.
– Quand ils ont commencé à forcer tous les ivoirien à être membres du RHDP-RDR, je n’ai rien dit, car je ne suis pas membre d’un parti politique.
– Et quand je fus arrêté dans la rue, bastonné, menotté pour rien et jeté au sous-sol de la DST de Cocody pour être interrogé pendant douze heures par des commissaires de police, tous des Dioulas qui se relayaient pour m’accuser d’un complot imaginaire contre la sureté de l’Etat de Côte d’Ivoire, il n’y avait plus personne pour protester et me défendre.
De grandes souffrances attendent les ivoiriens. Bon début d’année et bonne chance chers compatriotes.
Dr Serge-Nicolas NZI
Chercheur en communication
Mail : nicolasnzi@bluewin.ch – tel. 0041792465353. LUGANO (Suisse)